Le projet facteur

Le projet facteur

Voici un projet mis en place dans ma classe depuis plusieurs années. Avec comme objectifs d’amener les élèves à comprendre la fonction de l’écrit, leur donner l’envie d’écrire par eux-mêmes et ainsi développer les écrits autonomes.

projet

Pourquoi une boite aux lettres dans la classe ?

Moi qui aime enseigner par projets … en voilà un très beau : écrire aux copains, à la maitresse, à l’ATSEM. Et voilà des enfants qui prennent plaisir à écrire, qui développent des compétences car ils en ont besoin, l’utilité.

Cela passe par le PS qui va vouloir apprendre à écrire son prénom pour signer et ne plus coller son étiquette prénom, à un autre qui va s’entrainer à copier le prénom de sa copine pour pouvoir l’écrire fièrement sur l’enveloppe jusqu’aux plus experts qui vont encoder un mot, une phrase, un courrier entier.

Les enfants découvrent aussi les codes de la lettre : écrire BONJOUR pour commencer, signer de son prénom en bas de la feuille, écrire le nom du destinataire sur l’enveloppe et pas l’inverse 😉

Les enfants apprennent aussi à mettre en mots (ou en dessin) leurs pensées, le message qu’ils veulent transmettre.

Un objectif de vivre ensemble est rapidement apparu : les enfants ont écrit ce qu’ils avaient du mal à se dire (« Pourquoi es-tu méchant ? » – « Je veux que tu joues avec moi. » –  » J’aime pas quand tu te moques. »). Et cela a permis de régler quelques problèmes de récréation.

On a du courrier !

poster

Le projet facteur, c’est une boite aux lettres … des papiers … des enveloppes et tout simplement s’écrire. Quand je lance ce projet, c’est moi qui commence par écrire une lettre à tout le monde, pour la bonne année, ou à une rentrée … cela dépend.

lettre maitresse

Puis dans le coin écriture de la classe, on trouve des petites feuilles, des enveloppes (un TAS d’enveloppes car ils se prennent vite au jeu et elles disparaissent très vite) et UNE BOITE AUX LETTRES.
Cette année, nous sommes passés aux boites aux lettres individuelles. Merci le confinement 😉 et l’idée des maisons individuelles (allez visiter notre classe ROSEVILLE). Les enfants m’avaient fait cette demande : avoir une boite aux lettres individuelle comme cela « on sait quand on a du courrier ».

Avec la boite aux lettres collective, un jour par semaine, le facteur passait et distribuait le courrier. Avec les boites individuelles, les enfants voient chaque jour s’ils ont reçu une lettre ou pas.

Les écrits autonomes

Quand les enfants ont trouvé le message qu’ils veulent transmettre, ils essayent de le mettre en mots. Et pour cela plusieurs manières de faire :

  • chercher dans les éventails référents les mots les plus souvent utilisés :  formule de politesse – j’aime – verbes de la classe (Documents à votre disposition : pictogramme – éventail mots référents)
  • utiliser des mots référents de la classe : les prénoms, les cartes lexiques des projets
  • encoder en passant par plusieurs stades (selon Mireille Brigaudiot et Emilia Ferreiro)

E-Ferreiro

Lors de ce moment, les élèves réinvestissent les compétences travaillées en phonologie et en principe alphabétique à un autre moment de la journée. Ils se mettent ainsi en résolutions de problèmes pour écrire des mots inconnus.

Ils aiment écrire dès qu’ils ont un moment de libre. Je suis alors disponible pour les aider, les guider. Si je ne suis pas disponible, ils peuvent s’aider des outils mis à leur disposition mais aussi chercher ensemble.

Voici les étiquettes des mots référents à télécharger : référent coin écrivain. D’autres peuvent arriver selon les projets de la classe, les demandes ou les envies des enfants.

 

Par moments, « j’impose » à tous d’écrire en relançant le projet avec une lettre personnalisée pour chacun ou en mettant en temps d’apprentissage un moment « facteur ». Cela me permet de relancer les enfants qui participent moins au projet et d’aider ceux qui en ont le plus besoin.

Et pour ceux qui ne savent pas écrire  …

Les plus jeunes et même les plus fragiles en écrit (que ce soit au niveau moteur pour la graphie ou au niveau phonologique) veulent tous participer. Nous cherchons alors comment transmettre le message d’une autre manière :

  • en dessinant (ou gribouillant pour les PS 😉 mais les GS sont toujours contents de recevoir un message d’un plus petit qui se fait un plaisir d’expliquer ce qu’il a voulu dessiner)
  • en demandant de l’aide à un plus expert pour coder les sons entendus
  • en utilisant des tampons ou en demandant à un plus expert d’écrire à sa place (ce que font souvent les PS)

ecritPS

Au fur et à mesure, les élèves progressent dans leurs traces (dessin représentatifs ou tracés des lettres).
Ils avancent aussi dans les différents stades d’écrits autonomes. La lecture des stades d’Emilia FERREIRO m’a beaucoup aidée à ce sujet. Les plus jeunes ou les plus fragiles montrent vite l’envie d’écrire, de copier ou d’encoder des mots : nous voilà dans des projets d’apprentissages personnels. La mise en situation les incite à vouloir apprendre à écrire, à transmettre un message.

Le rôle de la maitresse

Lors de la toute première séance (quand ils reçoivent la première lettre), nous cherchons ensemble comment faire pour écrire à un copain, nous expliquons les codes de la lettre. L’avantage du cours triple : les GS se souviennent des années passées.

Pour la suite, je reste disponible pour les accompagner sur les moments d’accueil (matin et après-midi) ou lors de moments dédiés. Je m’adapte ensuite à chacun, en fonction de son avancée dans les stades d’E.Ferreiro, je sais ce qu’il doit travailler pour avancer (phono – principe alphabétique – graphie ).

Des séances d’apprentissages décrochées sont prévues sur les temps de phonologie.

Je relance aussi le projet quand je sens que les enfants s’écrivent moins : écrire un mot gentil à quelqu’un de la classe pour la Saint Valentin (merci @Tablettesetpirouettes pour l’idée), écrire une lettre aux parents, recevoir une lettre de la maitresse qui pose une question …

envoi

Un projet que j’aime faire … que les enfants réclament et qui permet de les faire entrer dans l’écrit de manière concrète, en plus d’autres projets comme la liste de courses ou les lettres de bonne année.

18 comments

Bonjour

Déjà merci pour tout ce partage.
Je me lance enfin dans ce projet avec mes GS. Je vais commencer dans un premier temps par une boîte collective.
J’ai juste une petite question. Comment procèdes-tu pour la lecture des messages ? En fin de semaine ? De journée ? En collectif ? Qui lit ?
Merci d’avance pour ta réponse.

bonsoir,
Super !!! N’hésite pas à me faire un retour.
Nous ouvrons la boite aux lettres une fois par semaine, habituellement le vendredi, mais ça pourrait être un autre jour. Ce qui est intéressant, c’est que le lundi matin à l’accueil, ils se précipitent sur les enveloppes pour écrire de nouveau.
A ce moment, je ne prends pas de groupe d’apprentissage avec moi, les enfants sont libres de répondre au courrier reçu ou alors de prendre une activité en autonomie si jamais ils ne veulent pas écrire.
L’ouverture du courrier se fait en collectif (pour ceux qui en ont reçu), l’ATSEM et moi lisons les lettres. C’est souvent assez rapide ;), cela permet aussi un retour sur les écrits illisibles. Nous demandons à l’enfant de venir nous dire ce qu’il va voulu dire et nous expliquons pourquoi nous avons pas réussi à lire, là où il faut progresser.
Ensuite les enfants vont écrire leur message en s’aidant des référents ou d’autres enfants plus experts ou de moi-même. C’est un moment où je suis beaucoup demandée mais au fil des séances, les enfants sont de plus en plus autonomes.

Bonjour Délia

Après un long temps d’arrêt et un confinement, j’ai enfin pu poursuivre mon projet facteur. Mais je me pose encore quelques questions. J’ai d’abord travailler les codes de la lettre avec eux, sur ce point ça va. Je leur ai donc proposé ensuite en petits groupes d’écrire une lettre à une personne de leur choix dans la classe. C’est à ce moment que nous avons cherché ensemble comment on pourrait bien faire alors qu’on ne savait pas encore écrire vraiment tout seul : Nous avons donc essayé de trouver les différentes manière de faire (présentation des référents , utilisation des mots outils présents dans la classe, encodage …).
Après avoir réfléchi au message qu’ils voulaient transmettre, ils se sont lancés dans la mise en mot. Et c’est là que j’ai du mal à trouver mon rôle ! Et du coup j’ai plein de questions ?
Certain l’ont fait tout seul sans me demander d’aide mais le message ne veut rien dire (j’ai un élève qui a juste écris « jouer » en recopiant un mot référent) dois-je laisser le message tel quel pour la lecture ?
J’en ai un autre qui a essayé uniquement en encodant (« JTAVITRAIJOUERHMA ») pour « je t’inviterai jouer chez moi ». Est-ce que je laisse comme cela et on voit ensemble à la lecture du courrier ?
J’ai aidé d’autres enfants à encoder car je sais qu’ils pouvaient le faire mais il reste des erreurs (« est-ce que tu ve jouer avec ma ») A quel moment je leur donne la véritable orthographe ?
Certains enfants me demandent presque tous les mots ? Comment procéder avec ses élèves ?
Et j’en ai bien sur d’autres qui n’ont rien écrit du tout à part « Bonjour » et « Au-revoir » … (Je reprendrai avec eux ce que signifie transmettre un message).

J’espère avoir été clair dans mes explications.
Merci d’avance pour tes éclaircissements

bonjour Céline.
Que de messages dans votre classe ! SUPER! Ce projet est, je pense aussi difficile pour les enfants que pour l’enseignant. Selon mon expérience, 2 points importants qui peuvent vous aider : selon la séance, se fixer un objectif et s’y tenir ET s’adapter à chaque enfant, choses que l’on fait à chaque fois allez vous me dire… je m’explique !
S’il y a un moment facteur dans la classe, pour moi la priorité est transmettre un message à un autre (copain, classe, parents … selon la demande!), je pense donc qu’il est important d’encourager toutes traces laissées et de les valoriser. Personnellement, je fais le choix (surtout sur les premières séances) pour ne pas les décourager de ne pas reprendre leurs traces ! Certains diront qu’il faut l’orthographe normée en dessous mais n’est-ce pas alors écrire sur LE MESSAGE de l’enfant et du coup risquer de lui couper l’envie de faire et d’essayer. Je laisse donc les traces telles quelles (mais pour moi, je note où chacun en est par rapport au stade d’E. FERREIRO) et lors de l’ouverture des lettres, je fais remarquer à l’expéditeur si j’arrive à lire ou pas. Je lui fais ainsi comprendre qu’il a essayé mais dot encore progresser en écoutant mieux TOUS les sons ou en écrivant les « bonnes » lettres et pas des lettres au hasard.

Je sépare donc les moments de facteur et de phono pure. Lors de ces séances, on traite vraiment du passage de l’oral à l’écrit et on montre aux enfants que leurs idées sont lisibles (ou pas) mais qu’il y a en français une façon d’écrire (pas toujours logique 😉 ) les sons dans ce mot en particulier.

J’agis ensuite en fonction de chacun. C’est à dire qu’un enfant expert en encodage, lors du moment de facteur, je vais lui rappeler que l’orthographe n’est pas la bonne et le guider vers des référents où la graphie correspond à ce qu’il cherche. Mais à l’inverse pour un enfant qui débute dans l’encodage, qui se lance dans l’écriture de longs messages, je vais l’aider, lui décomposer les mots mais le laisser écrire ce qu’il entend (un MS a écrit JER pour écrire JOUEUR… il n’entend pas le OU, il code le EU par E et entend le R. SUPER à son niveau… sachant que le mot était dans une phrase qu’il a voulu encoder (avec mon aide) jusqu’au bout.

Ces séances sont déstabilisantes au début pour l’enseignant, car on ne peut pas tout contrôler… mais rassurons-nous : un enfant qui va envoyer 1 ou 2 messages sans que nous ayons un œil dessus ne fera pas des fautes d’orthographe au CP! 😉 Par contre, il se sera lancé de lui-même dans le projet, aura envie d’écrire aux autres, va venir nous solliciter et là nous pourrons l’aider au niveau de SES compétences à lui.

Pour ce qui est de la multitude de traces laissées par vos élèves, je les trouve toutes très riches et elles sont toutes pour moi un message au niveau de chacun. L’enfant qui arrive à écrire bonjour (donc ose écrire un message à quelqu’un, trouve le bon référentiel, recopie, prend une enveloppe, écrit le prénom du copain) a déjà fait un pas énorme dans la transmission de messages ÉCRITS.
Celui qui vous demande tous les mots a compris le principe du langage écrit mais ne se sent pas assez sûr pour faire seul, au fur et à mesure de ces séances et des séance de phono il prendra de l’assurance.
Celui qui écrit un message avec un orthographe non normé est autonome dans l’écrit, il va falloir lui apprendre que le code mais cela viendra avec le temps et en s’appuyant sur des référents.
Celui qui écrit phonétiquement est entré dans l’écrit ! Les séances de principe alphabétique vont l’aider à progresser.

25 élèves … 25 messages différents … 25 (ou peut-être moins) de niveaux différents en encodage, dans l’écrit.
C’est en cela que le projet est complexe. Il est aussi possible de se lancer au début en demie classe et ainsi pouvoir aider plus d’élèves.

Personnellement, je sais qu’avec le temps, j’ai appris à lâcher prise et laisser des élèves totalement autonome sans même voir ce qu’ils écrivaient. Le retour se fait ou pas lors de l’ouverture de la lettre. Mais lors des séances de phono, on explique souvent que les sons ne s’écrivent pas tous pareils, qu’on ne peut pas le savoir, qu’il faut l’apprendre. Et je pense que les enfants l’intègrent assez bien.
Et je prends surtout plaisir (comme vous je pense) à voir chaque petit message qui passe entre eux (dessin, pseudo lettres, mots, phrases …). Ils s’envoient des messages écrits alors qu’ils peuvent se parler 😉 mais en fait ils aiment recevoir du courrier et en envoyer ! La motivation étant personnelle, je trouve qu’ils progressent très vite en écriture et phono.

Désolée pour ce long long message…

Merci beaucoup pour toutes ces précisions. Cela m’éclaire beaucoup.
Distribution des premiers courriers demain, j’ai hâte !

Bonne soirée

Bonjour merci de ce projet.

Je vais le mettre en oeuvre dès cette rentrée.
Je vais utiliser 1 boite commune pour commencer. Peux tu me dire très rapidement commentbtu l’as fabriquée? Que j’ai des grandes lignes pour m’y mettte ?
Merci et bonne préparation de rentrée 😀

ah super tu me diras comment les élèves ont réagi.
La boite aux lettres collective est tout simplement une boite à mouchoirs en bois repeinte en jaune et le logo de la Poste est collée dessus. 😉

Bonjour, un merveilleux travail. Par contre, depuis des années je cherche des outils comme les étiquettes montrées en photos pour les référents des mots. Et je trouve très difficile de le construire doit même ne sachant pas par où commencer. Un référent verbes? Un par thème. J’ai vu que vous aviez fait les mots interrogatifs. Avez- vous trouvé ces étiquettes sur le net?

Merci pour votre lecture.
Ces étiquettes référentes viennent de moi. Je viens de modifier l’article et de les partager dedans. D’autres se créent chaque année, selon les projets, les envies, les demandes des enfants.

bonjour, il s’agit de pochettes à rabats en plastique format A5 ou de pochettes en plastique style enveloppe. Elles sont fendues sur l’avant.

Bonjour, je suis T1 en GS et je viens de tomber sur cet article et comme cela fait envie !!! Merci infiniment pour ce travail et ce partage
J’aimerais me lancer dans ce projet porteur qui a du sens et qui donne du sens.

Merci beaucoup pour votre lecture. Pratiquant la pédagogie de projets depuis des années, je ne peux que vous conseiller de mettre en place ce projet ou tout autre : le sens permettant plaisir et apprentissage.

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